Outre divine
"Tu as compté mes
pas de vagabond,
dans ton outre recueille
mes larmes
Ne sont-elles pas écrites
dans ton Livre ?"
(Ps 56,9)
(Ps 56,9)
L'outre de Dieu, pleine des larmes du Psalmiste qui se confie
en Lui, de tous les psalmistes de tous les temps et par toute la terre, comment
l'imaginer ? On reste sans voix devant cette étrange jarre, contours de l'immense
sollicitude de Dieu devant qui rien n'est perdu, oublié, gommé, au sein de laquelle toute larme trouve sa place. Et l'on peine à deviner la mesure de cette divine
poterie.
Mais allons un peu plus avant dans les sonorités hébraïques de
ce verset : le mot employé pour dire l'errance, ou le vagabond, est "nod". L'outre, quand à elle,
se dit "no'd". Entre les
deux, un aleph de différence. Première
lettre de l'alphabet hébreu, lettre silencieuse qui ne se prononce que par la
voyelle qui lui est adjointe. Silence de l'âme ouverte, par la peine traversée,
de l'oreille creusée, du souffle suspendu..? Dans la mystique juive, le aleph évoque aussi Dieu Lui-même.
Symbolisme des lettres qui relaie le mouvement du psaume : entre l'errance et une
histoire qui retrouve un sens, une Présence qui accueille. Le psaume bascule
alors vers la confiance.
Aux bornes de ce verset, deux mots dont la racine est commune. Le premier signifie le fait de compter, le deuxième désigne le livre. Voilà donc nos pas comptés, nos larmes inscrites sur les pages du livre divin. Non plus erratiques,
absurdes, perdues dans la friche du non-sens, mais recueillies dans Son journal
intime enluminé de nos histoires, des pages où cheminer dans la lumière des vivants.