jeudi 25 février 2016


A la fin des temps, l'hospitalité

Matthieu 25, 31-45


Le cadre est solennel, le moment dramatique : voilà Jésus juste avant sa passion. La parabole dite "du jugement dernier" est sa dernière prédication avant le repas pascal. Elle fascine et dérange dans le même temps. Ce qui y est dit est grandiose : Jésus, le Christ, présent en tous ceux que nous rencontrons, sans même que nous en ayons conscience. Mais décourageant aussi : comment être à la hauteur de toute la misère du monde ? Comment accueillir à tout moment, secourir, visiter, libérer...? La tâche est hors de portée.

Mais relisons le texte de près. 
Avec ses justes et ses méchants; avec les litanies de ce que chacun aura fait, ou non... 
Et, comme celui qui raconte la scène, faisons deux colonnes.


Quand le Fils de l’homme viendra dans sa gloire, accompagné de tous les anges, alors il siégera sur son trône de gloire. Devant lui seront rassemblées toutes les nations, et il séparera les hommes les uns des autres, comme le berger sépare les brebis des chèvres. Il placera les brebis à sa droite et les chèvres à sa gauche.



Alors le roi dira à ceux qui seront à sa droite : “Venez, les bénis de mon Père, recevez en partage le Royaume qui a été préparé pour vous depuis la fondation du monde (v.34)

Alors il dira à ceux qui seront à sa gauche : “Allez-vous-en loin de moi, maudits, au feu éternel qui a été préparé pour le diable et pour ses anges (v.41)

Le ton est d'emblée différent, d'un côté, sont présentés : un Père qui bénit, et qui a préparé un royaume. Le premier accueillant, c'est donc Lui. L'hôte qui nous attend, c'est Lui. Hospitalité de la fin des temps prévue depuis la fondation du monde... 
De l'autre côté, se trouve seulement "maudits", comme un constat de malheur. Mais Dieu n'est pas associé à cette malédiction comme Il l'est à la bénédiction. Et puis le feu éternel, n'a plus rien d'un lieu où vivre, à l'inverse du royaume; il n'a pas été préparé pour les humains.

Les versets 35-36 et 42-43 sont assez proches, l'un en positif, l'autre en négatif. Primauté de l'attention au frère, présence "incognito" de Jésus en lui... 
De même qu'Abraham accueillait Dieu sans le savoir, ainsi tout homme est sans cesse en situation d'accueillir - ou non - le "Fils de l'Homme" sans le savoir.

Les versets 37-39 et le 44 diffèrent plus nettement.

Alors les justes lui répondront : “Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé et de te nourrir, assoiffé et de te donner à boire ? Quand nous est-il arrivé de te voir étranger et de te recueillir, nu et de te vêtir ? Quand nous est-il arrivé de te voir malade ou en prison, et de venir à toi ?” (v.37-39)

Alors eux aussi répondront : “Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé ou assoiffé, étranger ou nu, malade ou en prison, sans te servir ? (v.44)

D'un côté la liste est reprise in extenso, de l'autre, elle est résumée. Le conteur se serait-il lassé de cette énumération et aurait-il décidé de faire plus court afin d'aller plus vite à la conclusion ? On peut l'imaginer, mais on peut aussi se dire qu'une quatrième énumération n'aurait pas rajouté beaucoup de mots, l'auditeur n'était plus à ça près... Alors une autre hypothèse semble possible : la façon de dire les choses est révélatrice de ce que chacun a vécu. Ceux qui sont dans le registre de l'accueil prennent le temps de reformuler toutes les situations, comme si derrière chacune leur revenaient un nom, un visage, une histoire. Pour les autres, c'est de l'ordre des généralités, d'une liste qui ne semble correspondre à aucune personne réelle, aucune rencontre bénie.


Et le roi leur répondra : “En vérité, je vous le déclare, chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces plus petits, qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait !” (V.40)
Alors il leur répondra : “En vérité, je vous le déclare, chaque fois que vous ne l’avez pas fait à l’un de ces plus petits, à moi non plus vous ne l’avez pas fait.”(v.45)

Deux "petites différences" couronnent le tout : d'un côté il est explicitement fait mention du "roi", et celui-ci qualifie les plus petits de "ses frères". Entrer dans le royaume, dès maintenant, c'est entrer aux côtés du roi dans cette joie d'être frères.





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